« Dans quelques salons on se raconte l’histoire d’une chanteuse qui ne se produisait que très rarement sur scène mais dont la présence, la voix, le chant, la distinction étaient uniques. Et l’on s’y transmet comme un secret l’art d’une certaine Adrienne, interprète, auteur et compositeur, officiant à Paris et dans les capitales les plus lointaines à partir des années quatre-vingts.
Quelques-uns, qui n’ont pas eu l’occasion de voir la dame sur scène (au Loup du Faubourg par exemple, au Connétable ou encore au Petit Robert), se demandent parfois en riant si cette Adrienne, trop parfaite, trop rare, trop mystérieuse, a vraiment existé ou si elle n’était qu’un fantasme – mais deux disques auto-produits (Adrienne en 1992 et… Adrienne en 1997) tout à la fois les détrompent et prouvent qu’un tel degré d’achèvement dans l’art de la chanson a été possible. Et l’est encore, puisqu’en 2006 Adriana Voss a repris le flambeau d’Adrienne, l’interprète ayant décidé de remplacer le limpide prénom par un nouveau nom qui souligne discrètement par ses accents fassbinderiens le tropisme germanique d’une chanteuse fascinée par l’Outre-Rhin, de l’Allemagne à l’Europe Centrale, comme par les côtes de la Méditerranée d’ailleurs, ce contraste – ce double ancrage – constituant l’un des ressorts de son univers. Mais si le changement de patronyme ajoute un peu au mystère (et au plaisir) en créant un nouveau personnage, l’interprète et l’auteur, eux, n’ont pas bougé d’un iota et creusent toujours le même sillon… «
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Didier Dahon, novembre 2008